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un chœur de voix rudes qu’étouffe l’épaisseur des murailles souterraines, — leur parvient, à cause du profond silence de l’enfeu.
Chœur des vieux Serviteurs militaires

Le maître s’en va du burg en décombres,
Adieu, soifs d’amours, d’or et de combats !
Nous sommes très vieux et, bientôt, là-bas,
Nous serons des ombres.

Axël

Mes serviteurs veillent cette nuit. — C’est à ma prière qu’ils boivent et chantent ; ils saluent le départ… d’un étranger.

Sara

Aussitôt que le petit jour frappera ces vitraux, enfuyons-nous au pays de l’Espérance ! Comme oppressée à l’idée de joies futures, et fermant les yeux, elle appuie sa main contre le marbre d’une tombe : — Ô volupté de vivre !

Le Chœur, assourdi par le lointain

Adieu l’orgueil noir du Passé de fer :
Avec nous s’éteint sa lueur profonde !
Pareil au coucher d’un soleil d’hiver,
Tu meurs, ancien monde.

Soudainement, au dehors, le ciel se bleuit ; un rayon de l’aube traverse les franges des draperies du sou-