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des nations, — et sans honneur pour le pays.

N’importe !… Grâce à ceux des miens, qui, — à force d’années, avec cette héréditaire patience dont je fais preuve en ce moment, — ont armé mon donjon, je suis prêt à défier ces belliqueuses fantaisies. Étant d’une race de soldats et connaissant l’exacte étendue de sol qu’un corps de dix mille hommes, divisé en colonnes d’assaut, d’attaque et de soutien, peut occuper ici, mes dispositions sont prises depuis longtemps.

Le comte Axël d’Auërsperg revient s’asseoir, — en sa précédente attitude, accoudé auprès des lumières de la table. — Le fracas du tonnerre, les circonvolutions du diluvial orage, depuis quelques instants, semblent s’être rapprochés, resserrant les hauteurs du burg comme pour une suprême étreinte.

Tout d’abord, vous apprendrez qu’autour de moi le pays montueux et boisé s’oppose à toutes avancées d’artillerie : ce sont, en effet, de tous côtés, aux lointains, de circulaires et larges vallées, de torrentielles rivières, des myriades de roches, — et d’énormes arbres si pressés entre eux que, sciés à leurs bases, ils s’étayent les uns les autres sans pouvoir tomber : leur chute, d’ailleurs, entraverait la marche d’une armée. — Engager des canons au milieu d’une pareille contrée, en vue de me battre en brèche, exigerait,