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VII

Luttes avec l’Ange


Le Positivisme consiste à oublier, comme inutile, cette inconditionnelle et seule vérité, ― que la ligne qui nous passe sous le nez n’a ni commencement ni fin.
Quelqu’un.


Après un silence, Hadaly, de plus en plus impressionnante, reprit :

― Tout à coup l’actuelle Nature, alarmée de ces approches ennemies, accourt, bondit et te rentre dans le cœur, en vertu de ses droits formels non encore prescrits. ― Secouant, pour t’étourdir, les logiques et sonores anneaux de ta Raison, comme on secoue le hochet d’un enfant pour le distraire, elle se rappelle en toi. ― Ton angoisse ?… va, c’est elle ! c’est elle seule qui, sentant bien sa misère en présence de cet autre monde imminent, se débat pour que tu te réveilles tout à fait, ― c’est-à-dire, pour que tu te retrouves en elle, ― car ton organisme en fait partie, encore, ― et pour que tu refoules, par cet acte même, tes hôtes merveilleux en dehors de son grossier domaine ! Ton « Sens-Commun ? » Mais c’est le filet de rétiaire dont elle t’enveloppe pour paralyser ton essor lumineux, pour se sauvegarder et te reconquérir, toi, son prisonnier qui t’évadais ! Ton sourire, ― une fois les murs de ton cachot reconnus, une fois bien payé de ses obscurs prétextes, ― c’est le signe de son illusoire triomphe du moment, lorsque, tout per-