Page:Villiers de L'Isle-Adam - L’Ève future, 1909.djvu/274

Cette page a été validée par deux contributeurs.

noir et son oiseau de paradis sur l’épaule, elle revenait vers ses visiteurs terrestres.

Une fois auprès de la crédence, elle remplit de nouveau deux verres de sherry et vint, en silence, les leur offrir.

Ses hôtes l’ayant remerciée d’un geste, elle s’en alla replacer les deux verres sur le plateau vermeil.

― Minuit trente-deux minutes ! murmura Edison. Vite, occupons-nous des Yeux ! ― À propos de vos yeux futurs, Hadaly, dites-moi… pouvez-voir, d’ici, avec les vôtres, miss Alicia Clary ?

Hadaly, à cette parole, sembla se recueillir un instant.

― Oui, dit-elle.

― Eh bien ! apprenez-nous sa toilette, ce qu’elle fait, où elle est ?

― Elle est seule, dans un wagon en marche, votre dépêche à la main, essayant de la relire ; la voici qui se lève pour se rapprocher de la lampe ; mais le chemin de fer va si vite… qu’elle retombe : elle ne peut s’y tenir debout !

Et Hadaly, sur ces derniers mots, eut un rire léger qui fut partagé, très bruyamment, et avec un timbre de puissant ténor, par l’oiseau de paradis.

Lord Ewald comprit que l’Andréïde lui montrait qu’elle savait rire aussi des vivants.

― Puisque vous avez ainsi la seconde vue, miss Hadaly, dit-il, seriez-vous assez aimable pour regarder comment elle est vêtue ?

― Elle porte une toilette d’un bleu si clair que sa robe paraît verte à la lueur de la lampe, répondit Hadaly ; et elle s’évente, maintenant, avec