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duits autour de ces êtres par leur présence. Eh bien ! la correspondance de ces mornes Circés dans le monde végétal (puisque n’étant elles-mêmes, malgré leurs formes humaines, que du monde animal, il faut regarder au-dessous pour préciser leur correspondance), celle-ci n’est autre que l’arbre Upa, dont elles sont, en analogie, comme les myriades de feuilles vénéneuses.

Il apparaît, très doré par le soleil. Son ombre, vous le savez, engourdit, enivre d’hallucinations fiévreuses et, si l’on s’attarde sous son influence, elle devient mortelle.

Donc, la beauté de l’arbre doit être empruntée et surajoutée à lui-même.

En effet, sarclez l’upa de ses millions de chenilles pestifères et brillantes : et ce n’est plus qu’un arbre mort, aux fleurs d’un rose sale et dont le soleil n’arrache plus un reflet. Sa vertu meurtrière, même, disparaît si on le transplante hors du terrain propice à son action, et il ne tarde pas à dépérir, dédaigné de toute attention humaine.

Les chenilles lui sont nécessaires. Il se les approprie. Et tous deux s’attirent, lui et l’innombrable chenille, à cause de l’action funeste où doit se réaliser leur ensemble, qui les appelle en sa synthétique unité. Tel est l’upa, ― le manchenillier, si vous le voulez. Certains amours tiennent de son ombre.

Eh bien ! en échenillant de leurs attraits, aussi délétères qu’artificiels, la plupart de ces femmes dont l’ombre est mortelle, ― il en reste… ce qui reste de l’upa dans cette même conjoncture.

Remplacez le soleil par l’imagination de qui les