Page:Villetard de Laguérie - La Corée, indépendante, russe, ou japonaise.djvu/93

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’ils mangent le matin, à midi et le soir une ration d’orge émulsionnée dans de l’eau de son avec des légumes secs coupés, ils marchent tous les jours sans fatigue, sous des charges de 70 à 100 kilos. On les loue 2 dollars 40 sen, soit environ 6 francs, par jour.

Bien m’en prit d’avoir choisi ce moyen de locomotion.

Les routes de Chine sont peut-être moins mauvaises que celles de Corée ! Imaginez-vous une marche dans un champ labouré et vous aurez une idée approximative du voyage de Chémoulpo à Séoul, par le temps de dégel qui régnait. L’eau sourdait des pentes, stagnait dans les ensellements, délayant le sol argileux en une boue gluante où je craignais toujours de voir ma monture rester scellée ! Quelles bonnes briques on pourrait faire si le pays avait du charbon ou du bois en quantité suffisante ! Mais presque tous les mamelons sont dénudés. Partout, des taches noires en manifestaient la cause : les incendies, allumés par brutale insouciance ou fidélité à des coutumes absurdes. De loin en loin, sur quelque déclivité, un bouquet de pins verts, d’une fraîcheur exquise, inclinant, comme dans le paysage japonais, ses colonnettes rouges et l’échevèlement de ses branches dans des sens différents, recréaient l’œil par une impression artistique.

Mais cela ne faisait que mieux sentir le charme qu’aurait ce pays de la « Sérénité du Matin », si la lumière de tableau que le soleil y tamise à travers la