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torze heures, coupée de repas très brefs et presque sans repos, à le compter grain à grain, et recommenceront le lendemain sans devenir idiots au bout de quelques semaines. Mais il n’y est né personne pour inventer un compteur mécanique. De même pour tout le travail industriel. S’ils apprennent l’existence d’une machine, vite ils l’achètent en double, démontent un des exemplaires, le contrefont minutieusement pièce à pièce, en prenant parfois la précaution de changer un écrou ou une vis de place, et la montent ensuite en se guidant sur le témoin qu’ils ont gardé. Le produit est très mauvais, son travail également ; mais le prix de revient est si bas que, même dans ces conditions, l’opération n’est pas désavantageuse. Seulement ils ne sauraient ni perfectionner vraiment la machine, ni appliquer à un autre besoin son principe ou l’agencement de quelques-uns de ses organes. Leur imitation même prouve pur sa minutie que, si leurs yeux ont vu et leurs mains reproduit le modèle, c’est machinalement, sans que leur intelligence s’en soit rendue maîtresse. Leur croyance persistante à la sorcellerie européenne les convainc que l’essentiel est de faire les mêmes dents, coussinets, roues, etc., et de les placer exactement dans le même ordre. Mais ils n’ont aucune idée des combinaisons génératrices de poids, de proportion entre la force motrice et le travail utile attendu, des facilités ou des empêchements procurés par le fini ou la grossièreté de certaines parties. L’essentiel, croient-ils, est de produire à très bon marché. Ils y réussissent, mais