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LA VIE AU JAPON.

habitées durant l’été par les citadins. Il faudrait d’abord qu’il y eût des omnibus, des chemins de fer ou tout au moins des fiacres et des voitures de maître, toutes choses inconnues jusqu’à ces derniers temps aux sujets du mikado. Mais s’ils n’ont pas des Ville-d’Avray et des Montmorency comme les Parisiens, ils ont leurs Vichy, leurs Luchon, leurs Barèges surtout. Les eaux minérales sulfureuses abondent au Japon, et les habitants du pays n’ont pas attendu les conseils des médecins européens pour en deviner les propriétés bienfaisantes.

Aussi, toutes les sources de ce genre qu’on a découvertes jusqu’ici, tant dans le Niphon que dans l’île de Kiou-Siou, attirent-elles pendant la saison un grand nombre de malades, qui semblent aimer, autant que ceux des villes d’eaux européennes, à charmer le temps de leur cure par toutes sortes de divertissements. M. le comte de Beauvoir a tracé un charmant tableau de la plus élégante et de la plus à la mode de ces villes d’eaux, Mionoska, sur les flancs du Fousi Yama :

« Bâti dans une vallée très profonde et sur le flanc d’une montagne fort escarpée, le village n’a que des escaliers de granit pour rues, et les maisons, perdues au milieu des cascades, semblent perchées les unes au-dessus des autres. Nous avons dégringolé plusieurs centaines de marches avant d’arriver à la plus belle tcha-jia (maison de thé), le grand casino de céans. Oh ! jamais je n’oublierai ce coup d’œil ! Sur une profondeur de plus de cent mètres, la tcha-jia se composait de deux belles galeries ouvertes liées en fer à cheval. Là se prélassaient plus de trois cents baigneurs et baigneuses à peine sortis de la douche du soir. À notre vue ils ont appelé toute une nouvelle recrue qui était, parait-il, à barboter encore dans l’eau, et la foule se pressa curieusement et poliment autour de nous pour nous contempler. Il y avait des princes, des princesses, des enfants, des jeunes filles. »

Les voyageurs ne purent trouver place dans cette maison déjà pleine ; mais un peu plus loin ils rencontrent une autre