Page:Villetard - Le Japon, 1879.djvu/76

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
74
LE JAPON.

Par malheur pour lui, ces marchands étaient des Anglais. Quand les ministres de la reine Victoria virent que toutes leurs réclamations pour obtenir satisfaction de ce crime restaient inutiles, ils se décidèrent à donner ordre à l’amiral Kuper d’en venir à des mesures de rigueur. Celui-ci s’empara de trois beaux steamers que le prince venait précisément d’acheter en Angleterre ; le prince, pour se venger de cette capture, fit ouvrir par ses batteries un feu terrible sur l’escadre anglaise, et celle-ci, dans le combat qui s’ensuivit, brûla la capitale du prince de Satzouma.

Ainsi tout concourait à exciter l’indignation des daïmios. Leur mot d’ordre était tout trouvé : guerre aux barbares ! Leur tactique était indiquée par la situation même : ils avaient sous la main le mikado, cet empereur éternellement fainéant au nom duquel les shogouns exerçaient le pouvoir depuis trois siècles ; il fallait se servir de lui pour renverser les shogouns et gouverner en son nom.

Bientôt, en effet, tous les daïmios du sud, qui s’étaient depuis longtemps armés sous prétexte de se mettre en état de résister aux barbares, proclamèrent hautement le but qu’ils se proposaient. Ils publièrent des mémoires où ils établissaient les droits du mikado et où ils combattaient l’usurpation des shogouns ; d’autres où ils essayaient d’exciter le patriotisme japonais contre les étrangers. Enfin, un jour, le shogoun, nommé Stotsbachi, se résigna à obéir à leurs sommations et se démit de son autorité entre les mains du mikado. Aussitôt les conspirateurs remplacent autour de l’empereur la garde attachée à la cour d’Yédo par une garde dont ils étaient sûrs, et ils choisissent quelques-uns d’entre eux pour former une sorte de gouvernement provisoire officiellement chargé de restaurer l’antique autorité du souverain de Kioto (janvier 1868).

Les clans du nord, dévoués de longue date à la famille des Takoungawa qu’on venait de renverser, prirent les armes,