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QUELQUES MOTS SUR L’HISTOIRE DU JAPON.

et toutes les humiliations imaginables. Il est vrai que les manants et les vilains japonais savaient au besoin se faire respecter, et l’on cite quelques vengeances terribles exercées par eux sur les seigneurs qui s’avisaient de prendre trop au pied de la lettre l’article 45 des cent lois. On a dit que le régime de la presse aux États-Unis est la liberté absolue, tempérée par le revolver. Les paysans du Niphon ont fait parfois comprendre aux nobles dont ils étaient les vassaux que le pouvoir absolu de la féodalité était tempéré dans les cas extrêmes par la révolte et par l’assassinat.

III

Le Japon depuis Iyeyas jusqu’à la révolution de 1868.

Iyeyas mourut dans les premières années du xviie siècle[1]. Quatorze shogouns, tous de la famille des Tokoungawa, se succédèrent régulièrement depuis cette date jusqu’à la révolution qui abolit, il y a seulement dix ans, le shogounat. L’œuvre d’Iyeyas a donc duré plus de deux siècles et demi, et pendant tout ce temps, s’il y eut souvent des mécontentements et des tentatives de conspiration ou de révolte, jamais du moins le pays ne fut dévasté ni par la guerre étrangère, ni par la guerre civile. Le souverain qui a su assurer après lui à son peuple, par l’effet des lois qu’il lui a données, une si longue période de paix et de prospérité, a quelque droit à être rangé parmi les plus grands politiques du monde.

Il ne faudrait pas cependant conclure des éloges décernés par la plupart des écrivains européens à l’œuvre d’Iyeyas que le Japon ait joui pendant deux siècles et demi d’un bonheur parfait. Tout tableau a ses ombres, et le régime qui vient de s’écrouler avait ses mauvais côtés. La paix régnait,

  1. En 1604 d’après M. Bousquet, en 1606 selon M. Humbert.