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LES HABITANTS.

quet, comme devant Notre-Dame, comme à Bourges, comme à Rome et à Athènes, l’âme humaine se sent à la fois élevée et écrasée. On reste stupéfait devant ces accumulations de pierres, ces toitures colossales et cet encadrement merveilleux d’arbres éternellement en deuil. »

Une foule d’autres temples également élevés pour abriter la sépulture d’autres shogouns, quoique moins merveilleux, méritent encore l’admiration. Ils sont, ou du moins ils ont été jusqu’ici très soigneusement entretenus. D’autres, qui ne le cédaient peut-être en rien à ceux-là, ont été détruits par un incendie, et il n’en reste plus que les fondations.

Les temples, les chapelles et les bonzeries de Nikko forment une sorte de ville sainte infiniment curieuse. Il serait bien à désirer qu’avant que d’autres incendies ou des tremblements de terre l’aient renversée, des Européens puissent photographier un à un tous ces monuments aussi intéressants pour l’historien que pour l’artiste.

À quelques lieues au sud de Nikko se trouve la ville de Kiriou, qui mérite d’être signalée pour des raisons toutes différentes. Ce ne sont ni les temples ni les tombeaux qui en font l’intérêt ; c’est l’industrie. On y teint et on y tisse la soie, mais avec des procédés singulièrement primitifs. Les Japonais possèdent déjà des chemins de fer et des bateaux à vapeur ; mais ils n’ont pas encore adopté, pour la fabrication des étoffes, les machines perfectionnées de nos grandes manufactures ; aussi, malgré le bas prix où la main d’œuvre est restée chez eux, des soieries beaucoup moins belles que les nôtres reviennent à un prix beaucoup plus élevé. On a appelé Kiriou le Lyon du Japon ; soit, mais Lyon avant les progrès de notre outillage industriel.

Nikko et Kiriou se trouvent dans l’intérieur des terres. La ville de Sendaï s’élève sur la côte orientale du Niphon, à soixante ou soixante-dix lieues au nord d’Yédo. C’est une ville fort importante, où le commerce a déjà introduit beau-