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LE JAPON.

Jusqu’à ces derniers temps, les croyances religieuses des Japonais leur interdisaient de manger la chair du bœuf et de boire le lait de la vache. La race bovine n’en est pas moins bien représentée au Japon, par la bonne raison qu’elle est nécessaire pour cultiver les rizières. Seulement, le bœuf n’y est encore qu’un animal de trait ; bien que l’ancienne religion du pays perde chaque jour un peu de son antique influence, il faudra sans doute bien du temps avant que les usages, les habitudes et les répugnances qu’elle avait créés soient abandonnés. Le canard abonde au Japon ; il y a été très longtemps protégé par des lois sévères qui interdisaient de le tuer sous peine de mort. Le faisan, qui n’y a jamais joui d’une semblable protection, s’y trouve en grande quantité ; c’est surtout à lui que les chasseurs indigènes font une guerre redoutable, bien que leurs fusils de chasse soient des armes tout à fait primitives. On élève quelques volailles, des poules surtout, car les Japonais consomment beaucoup d’œufs.

La base de leur nourriture, avec le riz, est le poisson.

Les mers qui baignent les côtes de leurs innombrables îles et les rivières qui arrosent et fertilisent leur sol leur en fournissent en abondance. Nous ne chercherons pas à donner les noms de tous ceux dont nous parlent les voyageurs. Nous citerons seulement les énormes esturgeons qui se pêchent sur toutes les côtes du pays, les saumons qui se prennent en nombre prodigieux dans les rivières d’Yédo, les carpes qu’on élève avec amour et intelligence, et qui deviennent aisément aussi grosses que nos célèbres carpes du palais de Fontainebleau. Elles forment dans diverses rivières de véritables troupeaux, que leurs maîtres dirigent comme chez nous les bergers mènent leurs moutons. Le soir, ces pasteurs de poissons longent le cours de l’eau en frappant dans leurs mains ; à ce signal connu, les carpes se réunissent et rentrent docilement dans le réservoir où on les tient la nuit à l’abri des poissons de proie et des oiseaux pêcheurs ; le matin on leur rend leur