Page:Villetard - Le Japon, 1879.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
169
LES AFFAIRES ET LES VOYAGES.

et le gouvernement de Yédo, quand il s’est décidé à imiter l’Europe sur une foule de points, a été oblige de faire à la France, à l’Angleterre, et aux États-Unis des commandes considérables. Il nous a acheté des bateaux à vapeur, des frégates cuirassées, des batteries d’artillerie, des machines-outils pour les fabriques et les manufactures qu’il établissait, etc. De pareils achats représentent sans doute des sommes énormes, mais ils ne peuvent pas se renouveler souvent. Le mikado et ses ministres, s’ils veulent poursuivre l’œuvre de transformation qu’ils ont entreprise, auraient encore, il est vrai, beaucoup de grosses commandes à faire aux nations européennes ; mais il faut savoir s’ils trouveraient dans leur caisse assez d’argent pour les payer, car jusqu’ici leurs dépenses ont augmenté dans une proportion beaucoup plus considérable que leurs recettes. D’après M. Bousquet, nous ne pouvons plus espérer revoir en ce pays des affaires brillantes comme celles des premiers jours, mais, d’autre part, les relations commerciales ne peuvent plus être complètement interrompues. Les Japonais ont besoin de certains objets que seuls nous pouvons leur fournir, mais ces objets sont, par malheur, en petit nombre ; d’autre part, ils veulent garder leurs produits pour eux-mêmes. « Politiquement, conclut l’ancien conseiller légal du mikado, le Japon est ouvert ; commercialement, il tend à se clore de nouveau, en conservant une lucarne ouverte sur les marchés européens. »

Le commerce fait par les Japonais entre eux n’est guère qu’un commerce de détail, et l’humble rang qu’occupaient les marchands dans la hiérarchie sociale jusqu’en 1868, donne lieu de penser que leurs bénéfices étaient généralement peu importants. Cependant, quelques-uns d’entre eux, doués du génie du commerce, arrivaient parfois à de très grosses fortunes. Tel était à Yédo le bourgeois Mitsouï, qui, en outre de son commerce de soieries, faisait la banque et était devenu le banquier du gouvernement. Ses magasins occupaient les deux