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LA RELIGION ET L’INSTRUCTION PUBLIQUE.

langue populaire, diffère presque autant du chinois que de nos langues européennes. Mais lorsque le Japon entra en rapport avec la Chine, l’empire du Soleil levant était encore à peine civilisé, tandis qu’en Chine les lettres, les arts et la plupart des industries avaient atteint un grand développement. Ce fut dans des livres chinois que les Japonais, qui ne connaissaient pas encore l’écriture, apprirent à lire et à penser ; ce fut par eux qu’ils connurent les sciences et les arts ; ce fut à leur école qu’ils apprirent à raisonner ; tout naturellement une foule de mots chinois pénétrèrent dans la langue japonaise. La langue chinoise elle-même imposa ses formes et ses allures en même temps qu’une grande partie de ses mots à la littérature japonaise, au moins à la poésie, à l’histoire et à toutes les branches les plus hautes de cette littérature.

L’écriture chinoise est d’une effroyable complication. Au lieu de décomposer leurs mots en lettres et de représenter chaque lettre par un signe, comme dans toutes nos langues européennes, les Chinois ont une masse énorme de signes dont chacun représente un seul mot ; il leur faut pour écrire des milliers de caractères, en sorte qu’ils doivent consacrer les meilleures années de leur jeunesse à apprendre à lire et à écrire. Au Japon on a paré en partie aux inconvénients de ce système par la création d’un alphabet vulgaire qui, bien qu’employant des caractères chinois, leur donne à peu près la même valeur et le même rôle qu’aux lettres de notre alphabet ; mais la langue courante peut seule s’écrire avec ces caractères, tandis que l’écrivain qui s’occupe de littérature, de philosophie, de science, est sans cesse obligé de revenir au système chinois.

De là deux sortes d’instruction.

Jusqu’à ces dernières années il y avait des écoles supérieures répondant à peu près à nos lycées, où n’étaient admis que les fils des samouraïs. Celles de Kioto et de Yédo étaient