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LE JAPON.

et touchante. Le mort, avant d’être déposé dans sa dernière demeure, est conduit successivement dans chacun des cimetières de la ville. Veut-on le présenter à ces morts parmi lesquels il va prendre place ? Veut-on lui faire dire un dernier adieu à ceux qu’il a connus pendant sa vie et qui l’ont précédé dans la tombe ?

Tous les étrangers qui voyagent en France sont frappés des hommages dont les vivants entourent les monuments où les êtres qu’ils ont aimés dorment de leur dernier sommeil. Les tombes depuis longtemps fermées, et pourtant toujours soigneusement entretenues, souvent parées de fleurs fraîches et de couronnes, étonnent, charment et édifient les touristes venus chez nous du reste de l’Europe.

Sur ce point les Japonais sont bien vraiment les Français de l’extrême Orient. Les cimetières y sont fréquemment visités par les parents des trépassés, mais on dirait que les Japonais cherchent plus encore à distraire le mort qu’à l’honorer, et les champs du repos éternel sont des jardins remplis des fleurs les plus gaies.

On célèbre tous les ans, au mois d’août, à Nagasaki, une fête qui rappelle notre fête des Morts, Seulement, chez nous, la foule qui, dans la journée du 2 novembre, se répand dans les cimetières, est grave, recueillie, presque silencieuse. À Nagasaki, pendant trois nuits de suite, on honore ceux qui ne sont plus par des illuminations sur leurs tombes et des feux d’artifice tirés sur toutes les terrasses funéraires qui entourent et dominent la ville. Les éclats d’une gaîté étourdissante retentissent de terrasse en terrasse, et le saki (eau-de-vie de riz), qui se consomme dans ces trois nuits ne contribue pas peu à en augmenter l’animation. Il faut bien égayer un peu ces pauvres défunts qui aimaient tant à s’amuser de leur vivant.

Beaucoup de tombes, au lieu de contenir des cadavres, ne renferment que des cendres. Au Japon, certaines sectes ont