Page:Villetard - Le Japon, 1879.djvu/148

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
146
LE JAPON.

plus grand concours de fidèles, sont généralement assez petits ; mais, comme ils sont ouverts à tous les vents, la foule restée en dehors dans les vastes cours et dans les parcs magnifiques qui les entourent d’ordinaire n’avait pas besoin d’entrer dans le temple lui-même pour assister aux cérémonies. Sur l’autel un brûle-parfums, des candélabres, des vases, et surtout un miroir ; rien de plus. Les cérémonies varient suivant le temple et suivant la fête qu’on y célèbre. M. de Hubner a vu au temple de Yoshida, sur les flancs du Fousi Yama, un prêtre vêtu d’une ample robe de soie, coiffé d’un casque et muni de deux épées, livrer un combat terrible à un adversaire imaginaire, sans doute quelque démon, peut-être quelque bête féroce, ours ou panthère, dont un Kami, contemporain de la guerre de Troie ou de l’expédition des Argonautes, avait triomphé, à la grande admiration des hommes de son temps. — Dans une autre cérémonie, un bonze revêtu d’une sorte de chasuble richement brodée, s’avance, armé d’un arc, sur l’estrade qui supporte l’autel. Il regarde de tous côtés dans le ciel, puis, feignant d’apercevoir l’être qu’il cherchait, il décoche une flèche à cet ennemi invisible et renouvelle cet exploit à chacun des quatre points cardinaux. M. de Hubner pense que ce bonze terrasse ainsi les mauvais esprits. N’est-ce pas plutôt une façon de rappeler les exploits d’un chasseur qui aurait tué beaucoup d’aigles et de vautours, ou d’un guerrier qui, entouré dans un défilé, aurait abattu à coup de flèches les ennemis postés sur les hauteurs ?

Dans le cours du vie siècle de l’ère chrétienne une religion plus compliquée pénétra au Japon.

Le bouddhisme eut pour fondateur un prince indien de la puissante famille des Sâkyas, qui à l’âge de vingt-neuf ans quitta son père, ses femmes, ses enfants pour se donner à l’étude de la loi de Manou, des systèmes religieux et des exercices ascétiques des brahmanes. Comme rien de tout ce qu’on lui enseignait n’arrivait à le satisfaire, il se retira dans la