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LA FAMILLE, LA SOCIÉTÉ.

héritera de ses biens et qui s’acquittera des devoirs que nous venons d’indiquer. Très souvent dans une famille, s’il y a plusieurs fils, tous, à l’exception de l’aîné, entrent par adoption dans d’autres maisons moins heureuses. L’enfant adopté a dès lors deux familles, et ses nouveaux devoirs envers ses parents adoptifs ne le déchargent pas de ceux que lui avaient imposés la nature et la loi à l’égard de ses vrais parents.

Le chef de famille n’a pas seulement le droit d’adopter un étranger ; il peut aussi, en certains cas, chasser son vrai fils de chez lui. Cette expulsion fait sortir de la famille non pas seulement en fait mais encore légalement le membre qui, par ses crimes, par ses vices, ou même simplement par sa prodigalité, s’est rendu indigne d’y conserver sa place.

Elle ne peut être prononcée que contre un enfant majeur, quand son père et sa mère sont d’accord pour la demander au magistrat, et celui-ci ne l’accorde que quand les faits imputés au fils coupable lui semblent suffisamment établis et suffisamment graves.

Ajoutons que ce droit d’expulsion n’existe que dans le peuple et dans la bourgeoisie ; dans la noblesse, c’est-à-dire chez les samouraïs, le père, au lieu de s’adresser à un juge pour obtenir un arrêt d’expulsion, ordonnait lui-même à son fils de s’ouvrir le ventre. C’est probablement en ce sens qu’il faut entendre ce que disent les voyageurs au sujet du droit de vie et de mort attribué au père sur ses enfants.