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LE JAPON.

ôter à une nouvelle immersion. Voilà des chaussures que nous ne recommanderons pas aux chasseurs qui craignent les névralgies et les rhumatismes.

Les femmes sont restées jusqu’à présent fidèles à leur costume national. Elles continuent à disposer sur leur tête leurs cheveux d’un noir d’ébène en étages superposés, soutenus par d’immenses épingles d’écaille très ornementées. Elles gardent leurs robes de soie couvertes de broderies en relief, et leurs coquettes houppelandes par-dessus lesquelles elles attachent de larges ceintures d’une étoffe épaisse, aux vives couleurs, formant dans leur dos un énorme nœud d’un pied de large. Ce costume leur sied à ravir. Par malheur, quelques-unes des coutumes auxquelles elles sont restées fidèles jusqu’à ce jour sont loin de les embellir, au moins à nos yeux. C’est ainsi que souvent elles se teignent les lèvres avec du carmin ; parfois même elles s’y appliquent une dorure qui produit le plus étrange effet. Les jeunes filles ont généralement de jolies dents fort blanches ; mais dès qu’elles se marient, elles les revètent d’une épaisse couche de laque noire qui choque, encore beaucoup plus vivement que la peinture et la dorure de leurs lèvres, toutes nos idées sur la beauté féminine. En se noircissant ainsi les dents le jour de leur mariage, elles annoncent, dit-on, que, désormais elles ne veulent plus plaire qu’à leur mari ; intention fort louable, assurément : mais une Parisienne qui agirait ainsi plairait aussi peu à son mari qu’à tous les autres Français. Il est probable que les Japonais trouvent aux dents noires un charme tout spécial. C’est un goût que nous ne discuterons pas, mais qu’on nous fera difficilement partager.

Nous avons décrit les anciens costumes nationaux qui sont encore portés par presque tous les habitants du Japon. À Yédo, grâce à l’influence de la cour et des fonctionnaires, le costume européen a déjà gagné beaucoup de terrain ; mais ceux qui croient l’adopter s’en font souvent une idée singu-