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morale Allemagne ! Et cette violation sans pareille du droit des gens, même comme l'entendent les juristes du vieux monde, au lieu de pousser les gouvernements civilisés de l’Europe à déclarer hors la loi le gouvernement félon de la Prusse, simple instrument du cabinet de Saint-Pétersbourg, ne fait que les engager à examiner si les quelques victimes qui s’échappent à travers le double cordon qui entoure Paris, ne doivent pas être livrées au bourreau de Versailles !

Après la guerre la plus terrible des temps modernes, nous voyons l’armée des conquérants et celle des vaincus fraterniser pour le massacre en commun du prolétariat ; mais cet événement sans pareil marque non pas, comme le suppose Bismark, la défaite définitive d’une nouvelle société naissante, mais seulement la fin de la société bourgeoise qui tombe en poussière. Le plus grand effort dont la vieille société soit encore capable, c’est la guerre nationale ; et maintenant on sait que celle-là n’est qu’une ruse des gouvernements, destinée à détourner la lutte des classes, et à être abandonnée aussitôt que la lutte des classes fait éclater la guerre civile. La domination d’une classe ne peut plus se déguiser sous un uniforme national : tous les gouvernements nationaux ne font qu’un en face du prolétariat !

Après la Pentecôte de 1871, il ne peut plus y avoir ni paix ni trêve entre les travailleurs de France et ceux qui s’approprient leurs produits. La main de fer d’une soldatesque mercenaire peut, pour un temps plus ou moins long, englober les deux classes dans une oppression commune, mais la lutte se renouvellera toujours sur une échelle de plus en plus grande, et il ne peut y avoir de doute sur le point de savoir à qui doit rester la victoire définitive, aux exploiteurs peu nombreux ou aux producteurs qui forment l’immense majorité. Encore la classe des travailleurs français ne forme-t-elle que l’avant-garde du prolétariat moderne.