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remplacée par la déportation. Louis Bonaparte n’a pas osé, au moins en théorie, rétablir le régime de la guillotine. L’Assemblée rurale, n'ayant pas encore, la hardiesse d’insinuer que les Parisiens n’étaient pas des rebelles, mais des assassins, devait donc renfermer la vengeance qu’elle rêvait contre Paris dans les limites du nouveau code de déportation rédigé par Dufaure. Au milieu de toutes ces circonstances, Thiers lui-même n’aurait pas pu continuer sa comédie de conciliation, si elle n’avait pas, comme il l’espérait, arraché des cris de rage aux ruraux, dont l’esprit ruminant ne comprenait ni la comédie, ni ses nécessités d’hypocrisie, de tergiversation et de temporisation.

En vue des élections municipales du 30 avril, Thiers donna le 27 avril une de ses grandes scènes de conciliation. Au milieu d’un déluge de rhétorique sentimentale, il s’écria à la tribune de l’Assemblée : « Il n’existe aucune conspiration contre la République, excepté celle de Paris, qui nous force à répandre du sang français. Je le déclare encore une fois. Que ces armes impies tombent des mains qui les tiennent, et le châtiment sera arrêté immédiatement par un acte de paix d’où ne sera exclu qu’un très-petit nombre de criminels. » Aux violentes interruptions des ruraux il répondit : « Messieurs, dites-moi, je vous prie, si j’ai tort ? Regrettez-vous réellement que j’aie pu vous dire, en toute vérité, que les criminels ne sont qu’une poignée ? N’est ce pas chose heureuse qu’au milieu de nos calamités ceux qui sont capables de répandre le sang de Clément Thomas et du général Lecomte ne soient que de rares exceptions ? »

La France, cependant, faisait la sourde oreille aux paroles qui devaient, d’après les espérances de M. Thiers, produire l’effet du chant d’une sirène parlementaire. Sur cent mille conseillers municipaux élus par les trente-cinq mille communes qui restent à la France, les légiti-