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société en dehors de leurs rangs clair-semés. Les entraves par lesquelles leurs propres divisions avaient, sous les régimes précédents, modéré le pouvoir central, furent anéanties par leur union ; et, en vue du soulèvement menaçant du prolétariat, ils se servaient de ce pouvoir central, sans pitié et avec ostentation, comme du grand engin de guerre du capital contre le travail. Dans leur croisade contre les masses des travailleurs, il leur fallait non-seulement investir l’exécutif de pouvoirs de répression de plus en plus étendus, mais aussi, en même temps, enlever un à un, à l’Assemblée nationale, leur forteresse parlementaire, tous ses moyens de défense contre l’exécutif. L’exécutif, dans la personne de Louis Bonaparte, les chassa. Le produit naturel de la république du parti de l’ordre, ce fut le second empire.

L’empire, avec le coup d’État pour acte de naissance, le suffrage universel pour sanction et le sabre pour sceptre, prétendait s’appuyer sur les paysans, la grande classe de producteurs peu intéressée dans la lutte entre le capital et le travail. Il se proposait de sauver la classe des travailleurs en détruisant le parlementarisme et en affranchissant, en même temps, le pouvoir de la dépendance non déguisée que lui imposaient les classes riches. Il se proposait de sauver les classes riches en maintenant leur suprématie économique sur les classes productrices ; et, enfin, il se proposait d’effectuer l’union de toutes les classes en faisant revivre la chimère de la gloire nationale. En effet, c’était la seule forme de gouvernement possible à un moment où la bourgeoisie avait perdu la faculté de gouverner la nation et où la classe des travailleurs ne l’avait pas encore acquise. Ce gouvernement fut acclamé partout comme le sauveur de la société. Sous son règne, la société bourgeoise, libre de tout souci politique, a atteint un développement dont elle-même ne s’était pas crue capable. Son industrie et son commerce prirent des dimensions colossales ; l’es-