Page:Villeneuve - Le Temps et la patience, tome 1.djvu/90

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
84
LE TEMPS

m’arrêter davantage, mon repos a été assez long, je pars, & ne nuirai point à vos pupilles ; qu’ils profitent de l’occasion pour examiner toutes les raretés de mon Empire. Au revoir.

En parlant ainsi, quoiqu’il eût semblé immobile, il disparut à leurs yeux, non pas en devenant invisible, mais en s’enfuyant aussi imperceptiblement, & cependant avec autant de rapidité que la premiere fois, en sorte qu’il parloit encore, lorsqu’ils ne le voyoient que dans un éloignement extrême, & qu’ils cesserent tout d’un coup de l’appercevoir.

Cependant, pour obéir à ses ordres, & pour profiter de la permission qu’ils en avoient reçue, ils entrerent dans ce Palais, traversant une vaste cour, qui n’avoit pas le moindre ornement, ni le plus foible agrément. Quelques arbrisseaux naissants, rampants à terre, sans force, sans feuilles, & sans couleurs, presque sans forme, furent les seuls objets qui frapperent leurs yeux, représentant naïvement la saison qui agit sur la nature, & qui précede le Printemps. Ce rien, qui, sans le pouvoir définir, s’offroit à leur imagination, sembloit respirer un être & une forme. Une balustrade séparoit cette fade cour d’un jardin, qui n’avoit rien de