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LE TEMPS

ductrice, ils surmonterent une lassitude qui les auroit accablés sans le secours qu’elle leur prêtoit tour-à-tour. Ils marcherent tant, qu’enfin ils apperçurent un bâtiment, qui leur sembla prodigieusement gros. Quoique l’éloignement d’où il leur paroissoit, fût encore considérable, l’espérance d’y parvenir les ranima de nouveau ; & soutenus par la Patience, ils continuerent leur marche, & arriverent à la fin au but.

A l’approche du Palais du Temps, ils furent frappés d’une surprise qui alla jusqu’à l’épouvante : elle étoit causée par le bruit tumultueux d’un nombre infini de voix de tous âges, & de toutes especes, qui crioient tous à la fois, sur différents tons ; mais les compagnons de la Patience furent plus d’une heure sans pouvoir distinguer ce que disoient ces voix ; ils entendoient bien que cette cohue articuloit & prononçoit différentes choses, mais ils n’en pouvoient discerner que le mot de Temps ; & ce ne fut que par le secours de leur Conductrice qu’ils connurent que tous ces discours étoient adressés à ce Maître Souverain de l’Univers ; que les uns l’invoquoient, tandis que d’autres le maudissoient ; qu’ils imploroient sa faveur, regrettoient sa perte, ou desiroient