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LE TEMPS

Merille demanda à la Princesse travestie, quel motif l’avoit portée à ce déguisement & à cette fuite, puisqu’il n’étoit pas possible qu’elle se crût d’un grand secours au dessein que Benga avoit formé d’aller chercher leur sœur enlevée par des Inconnus, ou plutôt par des Invisibles ; au contraire, qu’elle sembloit plus propre à lui fournir de l’embarras que de l’utilité. Mais Benga prenant la parole, justifia Balkir, en disant à Merille, que la Reine de Bengal ayant un intérêt considérable à ce que son frere fût allié de la Famille Royale, pour le mettre à couvert de la punition que méritoient ses crimes & ses violences, elle avoit presque fait consentir ce Roi à promettre que cet indigne mortel épousât Balkir à la place de son ainée, & qu’il n’y avoit eu que sa seule présence & les vives représentations qui avoient suspendu ce dessein, qu’il ne doutoit pas qu’il n’eût été exécuté aussi-tôt qu’il auroit été absent ; que la peur de cet événement l’avoit porté à solliciter lui-même sa sœur de le suivre pour éviter ce malheur : mais que, pour voyager plus sûrement, ils avoient jugé à propos d’aller sans équipage, & de déguiser le sexe de Balkir ; qu’ils avoient eu le dessein de se rendre au Royaume d’Angole, où Benga avoit compté de laisser