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ET LA PATIENCE.

cée de s’en aller errante par le monde. Les larmes, la beauté de la jeune Princesse, & plus que cela, une puissante inclination que ces Princes fugitifs sentoient pour elle, leur persuada sans peine qu’elle étoit la même dont elle parloit : mais leur éducation ayant été plus réguliere que la sienne, ils ne se crurent pas autorisés par son exemple à lui demander des éclaircissements. La bienséance mettant des bornes à leur curiosité, ils se contenterent de lui offrir leurs services, & de la prier de permettre qu’ils voyageassent en sa compagnie ; ce qu’elle accepta avec plaisir : mais leur ayant témoigné le desir qu’elle avoit de chercher une habitation pour y trouver quelques nourritures, ils lui dirent qu’il n’étoit pas nécessaire qu’elle allât plus loin, ayant assez de provisions pour lui offrir un repas ; & sans attendre sa réponse, qu’ils jugeoient bien qui n’iroit point à les refuser, après n’avoir pas balancé à accepter leur premiere proposition, ils ouvrirent une de leurs makoukes, d’où ils tirerent de quoi remédier à la faim qui la tourmentoit.

Quoique les Princes de Bengal n’eussent communiqué à personne le dessein de leur fuite, ils n’étoient pas toutefois partis sans précaution, & ils avoient fait