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LE TEMPS

moins, pour faire sentir au Genre humain le tort qu’il a de penser si désavantageusement de moi, j’ai jugé à propos de me soustraire à son commerce pendant quelque temps ; mon absence lui donnera occasion de connoître sa faute & son ingratitude, il me souhaitera lorsqu’il croira m’avoir perdue ; c’est ce qui m’a obligée à me retirer dans ce désert, en attendant son repentir. J’y vis sans inquiétude, & avec toute la tranquillité qui me convient. En un mot, ajouta-t-elle, je suis la Patience, fille du courage & de la douceur ; comme mon courroux contre les humains est sans fiel, si je n’ai fait aucunes démarches pour aller au-devant de vous, je n’ai pu m’empêcher du moins de vous offrir mon assistance. Ce n’est point par humeur que je vous ai laissé faire les premières avances, j’en suis incapable, ce n’est que parce que j’ai appréhendé de vous être suspecte ; mais à présent que, sans crainte, je puis laisser agir mon goût bienfaisant, je vous promets ma protection : ce ne fera pas en cette seule occasion où elle vous sera nécessaire, je prévois que vous en aurez besoin plus d’une fois dans l’entreprise que vous avez faite ; je dis plus, vous ne pourriez en venir à bout sans mon secours, joint à celui du Temps.