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ET LA PATIENCE.

nemis, & à s’observer elle-même, pour ne donner aucune prise à leurs conjectures : ces diverses inquiétudes l’occupoient si fort, qu’elle en fut obligée de négliger les soins les plus importants de ceux qu’elle donnoit d’ordinaire à Merille, de telle sorte qu’elle étoit quelquefois des mois entiers, sans pouvoir s’en distraire un moment pour la voir.

De son côté, Mouba, loin de chercher à adoucir ses peines, employoit toute son industrie à les augmenter, & à lui faire sentir la pesanteur ainsi que la difficulté de la charge qu’elle avoit acquise : il vouloit encore pousser la dissimulation jusqu’à mettre cette Princesse dans le cas d’être forcée de le prier par politique, si ce n’étoit par choix, de l’en délivrer en l’épousant ; aimant mieux retarder à s’emparer du pouvoir souverain, dont il ne lui manquoit depuis long-temps que le titre, & avoir un prétexte à publier qu’il ne l’avoit point accepté par ambition, mais par pure complaisance pour la Reine, qui, née si loin de la place qu’elle occupoit, étoit entièrement incapable de s’y maintenir, s’il n’avoit pas la bonté de la partager avec elle, & de l’y affermir par ses conseils.

La situation des affaires influant sur l’é-