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ET LA PATIENCE.

desirer plutôt une fille qui devoit régner, qu’un Prince qui ne pourroit jamais être que Sujet ; &, cessant d’être incertaine, tous ses vœux se tournerent du côté d’une Princesse.

Le temps de ses couches étant enfin arrivé, le Roi se trouva incommodé, & ne put y assister ; ce qui donna à Mouba la facilité de ne laisser dans la chambre de la Reine que des personnes qui lui fussent dévouées : il sentoit bien que si cette Princesse accouchoit d’un enfant mâle, cela dérangeroit ses mesures, puisque son intérêt devenant commun avec celui des Princes, l’attacheroit à eux d’une façon si étroite, que toutes ses créatures deviendroient les leurs, & fortifieroient si fort leur parti, qu’il les rendroit plus redoutables. Il ne voyoit donc plus de ressource que de leur faire ôter la vie ; mais cela ne laissoit pas d’avoir sa difficulté, parce que leur conduite étoit trop sage pour lui donner occasion de les perdre sous l’ombre de la justice ; n’ignorant point qu’il ne lui étoit pas possible de leur rien imputer qui pût donner à croire qu’ils fussent coupables. D’ailleurs il n’osoit se flatter de trouver d’assez grands scélérats pour commettre furtivement le crime de les assassiner, & il n’espéroit plus rien