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LE TEMPS

une raison personnelle de se réjouir sincérement avec lui. Les Princes ses fils furent les seuls exceptés de la joie publique ; ils étoient assez âgés pour connoître que, malgré l’amitié que le Roi leur témoignoit, & les honnêtetés que la politique de la Reine l’engageoit à leur faire, rien ne pouvoit les dédommager du tort que leur causoit cette fécondité qui venoit mettre le comble à leur malheur, en les empêchant de se flatter que le Roi pût se repentir de l’injustice qu’il leur faisoit par l’exhérédation dont il les accabloit.

Mouba, que la surprise de cet accident avoit presque déconcerté, se remit en peu de temps ; ce ne fut qu’un premier mouvement qui l’étonna, & se rassurant aussi-tôt, il prit son parti, en réfléchissant qu’un enfant de plus dans une révolution d’Etat, étoit une bagatelle, puisqu’il seroit aussi aisément le maître de la vie de ce nouveau venu, que de celle des quatre autres personnes qu’il avoit à sacrifier : ainsi, loin de changer de dessein, il s’y affermit, en se reprochant cette pusillanimité, puisqu’un crime de plus étoit si peu de chose, qu’à proprement parler, il le comptoit pour rien.

Il reprit donc sa tranquillité & ses occupations ordinaires, qui étoient de faire