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LE TEMPS

Les provisions, dont ils avoient eu la précaution de se charger en partant, n’avoient pas pu durer, sans être renouvellées, aussi long-temps que leur voyage ; &, s’ils n’avoient point trouvé le secours de quelques fruits sauvages, ou de quelqu’insipides racines, ils auroient vu borner leur imprudente entreprise par la fin de leur vie.

Benga & ses cousins avoient bien des fleches, mais ils n’osoient les employer souvent à tuer du gibier, de peur de les perdre, & d’être privés de leur secours, lorsqu’ils en auroient besoin pour se défendre des bêtes carnassieres, par qui ils étoient continuellement attaqués ; & ils n’avoient recours à cette ressource, qu’en s’y trouvant absolument forcés par la nécessité.

Cependant, malgré la dureté du Temps qui les accompagnoit, ils se virent enfin hors de cette forêt, après deux mois d’une si pénible marche, & ne douterent pas que son courroux ne fût adouci, en appercevant une maison fort vaste, & d’une très belle apparence : ce Palais étoit de marbre de plusieurs couleurs, avec des compartiments qui produisoient un effet fort agréable. Ce beau lieu étoit si proche, que son aspect remit la joie dans