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LE TEMPS

être qu’après que vous aurez souffert bien des maux. La Patience, qui est exempte d’emportement & de fiel, vous offrira encore une fois son secours, sans vous délivrer de toutes vos peines, avant que vous en ayez eu de si affreuses, que jamais mortels n’en ont expérimenté de semblables ; & le Temps furieux ne se laissera fléchir à ses sollicitations, qu’après que vous aurez vu brouter l’herbe à vos compagnons, & que vous aurez vous-même servi de pâture à un monstre de figure humaine.

Le Roi Astrologue cessa ainsi de prédire les infortunes de cette jeunesse : ils en frémirent d’horreur & d’effroi ; mais ne voyant point qu’ils parussent changer de sentiments pour cela, il se retira, & les laissa ensemble faire leurs réflexions.

Lorsqu’ils furent seuls, le jeune Prince d’Angole prenant la parole d’un air effrayé : Ciel, quelle horrible prédiction ! s’écriait-il ; ah, ma chere sœur ! ah, belle Balkir ! de quelle terrible destinée sommes-nous menacés ! ne vaudroit-il pas mieux rester ici, & attendre le retour du bon Temps, sans l’irriter encore par de nouveaux mépris ?

La terreur qui le possédoit, passa dans l’esprit de ceux qui devoient partager ces