Page:Villeneuve - Le Temps et la patience, tome 1.djvu/17

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
11
ET LA PATIENCE.

sous son ombre & à ses propres risques, un chemin à l’autorité suprême.

Pour le succès des desseins secrets du Sacrificateur, il étoit nécessaire de perdre les Princes ; mais voulant le faire sans se rendre odieux, il vouloit aussi que cette action fût imputée à leur marâtre, afin que s’il manquoit son coup, l’indignation du Peuple tombât sur elle seule ; mais au contraire, s’il réussissoit, avec la confiance qu’elle avoit en lui, & le secours de son industrie, il étoit certain d’usurper plus aisément sur cette Princesse que sur les enfants du Roi, la place que son Maître remplissoit. Il ne voyoit dans la Reine qu’une femme sans appui, isolée de toutes parts, qui tomberoit sans retour dès qu’il daigneroit la pousser, d’autant plu-tôt, que n’agissant que par ses avis, elle lui donnoit, sans s’en appercevoir, les armes dont il avoit besoin contre elle ; avec quoi, sous le prétexte d’établir l’autorité prétendue qu’il lui ménageoit, il affermissoit la sienne à lui-même, s’approprioit les trésors dont elle lui confioit la disposition si imprudemment, & qu’il n’employoit qu’à faire des graces à ceux de qui il vouloit s’assurer.

La Reine n’étoit pas méchante naturellement ; au contraire, si elle eût resté dans