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LE TEMPS

le hazard y en conduisît, & il a toujours du bled en réserve pour deux ans ; en sorte qu’il peut nourrir dix personnes pendant ce temps, sans risquer de s’incommoder. Il renouvelle cette provision toutes les années, & dit qu’elle est absolument nécessaire, tant pour être en état de soulager les voyageurs égarés, que pour subvenir aux accidents d’une ou de plusieurs mauvaises récoltes.

Cette proposition fut unanimement acceptée ; & le jour étant trop avancé pour mettre du remede à la petitesse de leur logement, qui devenoit trop étroit pour dix personnes, dont le sexe différent rendoit encore l’arrangement plus difficile, il fallut ce soir-là que les Princes prissent le parti de céder la place à Merille & à Balkir, qui se fit connoître pour ce qu’elle étoit, & ils furent passer la nuit sous les arbres les plus proches.

Aussi-tôt le retour du soleil, les Princes abattirent du bois, travaillant avec tant d’adresse & de diligence, que deux jours après ils eurent de quoi se loger tous ; en sorte que le Roi Solitaire, en arrivant de chez son fils, ne souffrit aucunes incommodités de l’augmentation de compagnie qui lui étoit survenue en son absence.