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ET LA PATIENCE.

mes ; & mon fils, qui étoit toujours à mes genoux, tenoit une de mes mains, sur laquelle il avoit la bouche collée.

La Princesse rompit enfin ce silence funeste : J’avoue, grand Roi, que votre courroux est juste, me dit-elle ; mais c’est contre moi seule qu’il doit éclater. Le Prince, votre fils, n’a pu résister à mes foibles attraits, & je mérite d’être punie d’un amour téméraire, qui trouble la paix ainsi que l’union de votre auguste Famille. Je le mérite d’autant plus, ajouta-t-elle, que la privation de ma vie est à peine suffisante pour expier un crime que mon sot orgueil m’a fait commettre ; car enfin, Seigneur, je dois vous faire l’aveu entier de ma faute, en vous déclarant que j’ai été si offensée du refus que ce Prince avoit fait de ma main, que, par un desir de vengeance, j’ai fait des efforts pour lui plaire, qui n’ont que trop réussi. Mais, en lui inspirant cette fatale tendresse que je lui souhaitois par dépit, j’ai partagé le malheur où je le plongeois.

J’ai voulu vainement étouffer ces injustes sentiments, poursuivit-elle, il n’a pas été en mon pouvoir, & je suis moi-même l’artisan d’une punition qui retombe sur moi, de dont vous devez être