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ET LA PATIENCE.

de savoir qui il était, & par quelle fortune il se trouvoit habitant d’un lieu si désert. Il ne parut point offensé de ma curiosité ni de mes questions ; & sans se faire prier :

Je suis né, dit-il, sur le Trône, où j’ai reçu de la Reine ma mere une éducation conforme à ma condition, je dis de ma mere, car elle avoit perdu son époux avant que je visse le jour ; ainsi je fus Roi en naissant.

Elle eut, pendant mon enfance, tous les soins de moi & de mon Royaume que je devois attendre de son affection, n’épargnant rien pour me rendre digne d’occuper la place où le sort m’avoit fait naître, & qu’elle me conservoit soigneusement ; mais lorsque la raison m’eut ouvert les yeux sur les devoirs de l’état auquel j’allois être lié, je vis avec effroi les peines dont la Couronne est environnée. Ma minorité ne jouit pas d’un jour de paix, & fut d’autant plus agitée, qu’elle étoit troublée par des guerres civiles, malgré l’attention que ma mere avoit à les prévenir. Les Princes de mon Sang, & les Ministres, jaloux les uns des autres, ne lui laisserent pas goûter un moment la douceur du repos. Elle passoit plus de temps en conférences qu’en fêtes