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ET LA PATIENCE.

ment de ces lieux, mais il n’étoit couronné de fleurs que du côté où régnoit le Temps sage : de l’autre, il étoit regardé comme perturbateur de la liberté & des doux plaisirs. Il avoit un chapeau de houx, mêlé de soucis & d’absynthe, & ne pouvoit s’introduire dans ce canton que sous les auspices de Momus ou de l’Amour, ou bien qu’en répondant aux avances que lui faisoit la triste indigence, qui, cherchant le secours de Plutus, n’étoit pas délicate sur le choix des moyens propres à l’obtenir.

Cette répugnance décidée n’étoit pourtant pas égale entre les deux sexes : elle ne régnoit contre l’Hymen que parmi les jeunes hommes ; car le beau sexe, au contraire, le souhaitoit ardemment, regardant ce Dieu comme un temps qui viendroit mettre le comble à leur bonheur, en leur accordant une liberté que la jeunesse ne possede pas entiérement. L’Hymen remplit quelquefois leurs attentes, dit la Patience à ses pupilles, mais encore plus souvent il les prend pour dupes, & leur fait expérimenter, qu’au-lieu du temps heureux, dont ils avoient eu l’espérance, il ne leur fournit qu’un temps trompeur, court & passager, qui les abandonne à un éternel esclavage.