Page:Villemain - Histoire de Grégoire VII, tome 1.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
6
INTRODUCTION. — PREMIÈRE ÉPOQUE.

cabanes, mendiaient et prédisaient l’avenir. On lit dans Tertullien : « Tibère, sous le règne de qui le nom chrétien entra dans le monde, fit rapport au sénat des choses qu’il avait apprises de Judée, sur la divinité du Christ, et proposa de le reconnaître comme Dieu. Le sénat n’ayant pas la preuve des faits refusa. César persista dans son avis, en menaçant du supplice les accusateurs des chrétiens. » Que d’impossibilités dans ce récit ! Le sénat refusant quelque chose à Tibère un empereur romain proposant au sénat l’apothéose d’un supplicié juif ! L’histoire nous montre au contraire, dans le tyran de Rome, une inquiète sévérité contre toute innovation religieuse et tout culte venu d’Orient. Sénèque nous dit que, dans sa jeunesse, sous l’empire de Tibère, ayant adopté la diète pythagoricienne, il la quitta, sur la demande de son père, pour ne pas être confondu avec une secte étrangère, alors persécutée, que l’on reconnaissait à l’abstinence de certaines viandes[1]. Tacite nous parle d’un décret du sénat, sous Tibère, pour chasser d’Italie les cultes égyptiens et judaïques. Quatre mille affranchis romains, infectés de cette superstition, dit-il, furent déportés en Sardaigne, pour y servir à la répression du brigandage, sous un climat insalubre. Le

  1. In Tiberii Caesaris principatum juventae tempus inciderat alienigenarum sacra movebantur ; sed inter argumenta superstitionis ponebatur quorumdam animalium abstinentia. Patre itaque meo rogante, qui non calumniam timebat, sed philosophiam oderat, ad pristinam consuetudinem redii. (Senec., Episrt. CVIII.)