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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

ques pour avertir un roi corrompu d’Israël et protester contre l’idolâtrie de Damas et le schisme de Samarie.

L’action de ces hommes, dans les combats de la Judée avec la Phénicie, l’Assyrie, la Perse, est la plus grande peut-être que l’intelligence dévouée et passionnée ait exercée contre le nombre et la force. Ils furent l’âme du peuple hébreu, sa cymbale de guerre, le luth de son deuil et de ses afflictions, sa vie durable dans la captivité, alors que, démembré par les discordes, expatrié par la servitude, ses lieux saints, ses tombeaux, sa langue natale, lui étaient arrachés, et qu’il ne lui restait plus que sa foi dans le passé et dans l’avenir. Pour l’observateur historique, l’unité du peuple hébreu, sa persistance invincible, est dans le livre des prophètes, d’Isaïe à Zacharias et à Malachias. On y voit en symbole et en action le culte de Dieu, l’amour de la patrie juive, la persuasion des promesses divines, la certitude de la délivrance, l’immutabilité de la foi primordiale et l’extension future de ses rameaux transformés. C’est la lampe inextinguible qui brûle dans les sépulcres, mais où s’allume la torche que se passeront l’un à l’autre les peuples nouveaux.

Quelle ne fut pas, en effet, la puissance de ces paroles de feu des anciens prophètes, lorsqu’elles jaillirent dans le monde avec la parole évangélique, dont elles semblaient tantôt le mystérieux prélude, tantôt la sanction pénale ! Et plus tard, et toujours, quand la Bible devient