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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

phète, qu’elle ne trouble pas le son de sa voix et qu’elle tombe doucement de ses lèvres, nous en avons de nombreux exemples dans Pindare ; mais une gracieuse image s’en retrouve aussi dans l’ode charmante d’Horace :

Quem tu, Melpomene, semel
Nascentem placido lumine videris,
Illum non labor Isthmius
Clarabit pugilem, etc.

Ce mode adouci de la poésie lyrique n’en admet pas moins ces rapides passages, ces changements de sujet ou d’émotion que d’ordinaire on attribue seulement à l’ardeur de l’enthousiasme. Une part des cantiques hébreux est en cela merveilleuse. Elle n’a pas les digressions lointaines, quoique vraisemblables, du poëte thébain. Elle est renfermée dans des souvenirs plus saintement limités ; écho de la prière, elle est contenue dans l’enceinte du temple ; mais, là même, elle trouve la variété poétique dans la succession rapide des sentiments, tour à tour élevés jusqu’aux cieux, ou atterrés par la douleur et la honte. Ce n’est plus ici quelque ressemblance inévitable, quelque rencontre accidentelle de génie, que nous chercherons entre le Psalmiste et le poëte de Dircé ; c’est une élévation de nature à part, c’est quelque chose d’inimitable, que nous opposons d’un côté pour attester ce qui manque de l’autre :

« Ma voix monte vers Dieu, et je m’écrie sans