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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

de leurs antiques lois et célébrant lui-même dans des vers anglais les traditions de leur culte. C’était Williams Jones, l’auteur des Études sur la poésie asiatique. C’est à un autre nom cependant, à une âme plus chrétienne et plus inspirée, que nous demanderons, dans nos jours d’activité matérielle et technique, un reflet de l’Église primitive, un écho des chants lyriques de Grégoire de Nazianze ou de Synésius.

En 1823, un jeune ministre anglican, brillant élève de Cambridge et déjà célèbre par quelques poésies grecques, latines, anglaises, était envoyé à Calcutta, pour diriger, à titre d’évêque, les établissements religieux du Bengale. C’était un ministre protestant qui avait l’âme de Fénelon, et ce même goût d’antiquité, ce même attrait de culture élégante et d’imagination émue. Sa jeune femme, le petit enfant qu’elle amenait d’Europe, le luxe officiel dont sa charité même ne pouvait le délivrer, tout cela ne choque pas plus dans les Mémoires de sa vie que ne nous blessent dans l’histoire ecclésiastique les équipages de chasse et les études mondaines de l’évêque de Ptolémaïs, au quatrième siècle et sous le ciel de la Cyrénaïque.

Réginald Héber n’a pas moins d’élévation philosophique et de douceur chrétienne que Synésius. Il n’est pas époux moins tendre, poëte moins gracieux ; et, ce qu’il y a d’immense dans cette puissance anglaise dont il était un des modérateurs, cet empire absolu sur tant de millions d’hommes aussi opiniâtres dans leurs cultes