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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

tête sainte d’un usurpateur clément. Au-dessus, nous avons étendu la rose blanche comme neige, enlacée à sa rougissante ennemie. Le sanglier hérissé se vautre dans le sang de l’enfance, sous l’abri d’un buisson d’épines. Maintenant, frères, courbés sur sa trame maudite, enfonçons-y notre vengeance, et consommons sa ruine.

Édouard ! à soudaine mort nous filons ta toile ; la trame est achevée. À soudaine mort nous dévouons la moitié de ton corps. Le tissu est filé, l’ouvrage est fini. Arrête, oh ! arrête ! ne me laisse pas ainsi abandonné, sans bénédiction, sans pitié, à cette place, me lamenter en deuil.

Là-bas, sur ce point brillant qui enflamme les astres d’Orient, les fantômes s’effacent, s’évanouissent de mes yeux. Mais quelle marche solennelle, descendant des cimes du Snowdon, déploie ses brillantes armures ? Visions de gloire, épargnez ma vue souffrante ! Et vous, siècles encore à naître, ne venez pas en foule obséder mon âme ! Nous ne pleurons plus notre Arthur dès longtemps perdu. Salut, vous tous, rois nationaux ! lignée de la Bretagne, salut ! Entourés de maints barons hardis, ils portent haut leurs fronts parés d’étoiles ; et l’on voit apparaître belles dames, et vieux hommes d’État aux barbes majestueuses. Dans le milieu est une beauté divine ; son œil la proclame de descendance bretonne, et son port de lion, son visage commandant le respect, et

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