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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

France et de l’Italie, avait passé six années dans la lecture assidue des écrivains grecs, projetant une édition critique de Platon, puis de Strabon, philologue, métaphysicien, historien, géographe, et alliant la patience continue des recherches aux rares saillies de l’enthousiasme. On sait aussi que nul poëte n’avait plus curieusement étudié sa langue, n’en connaissait mieux les filons natifs, le métal indigène et les types frappés de la main du génie. C’est sur ce fonds si riche d’études et de souvenirs que passa par moment le souffle de la fantaisie, pour agiter la feuille d’or :

Sic leni crepitabat bractea vento.

Il n’y aura pas sans doute ici ce qui semble avoir été le caractère de Pindare, cette abondance naturelle de génie, cette âme ouverte de toutes parts à la poésie et retentissante comme le sanctuaire harmonieux d’Apollon. Le poëte anglais, cependant, était musicien aussi. Il avait, dans la variété de ses études, compris la théorie de cet art, et il chantait avec goût ; mais il ne chantait que pour lui-même et la Muse. Rien ne ressemble moins à la mission publique du poëte thébain, dans les fêtes et les périls de la Grèce, que le chant solitaire et rare du studieux reclus de Cambridge. Nul doute cependant sur la grande étude que l’un avait faite de l’autre, et sur quelques traits d’affinité qui les rapprochent.

Un savant helléniste a célébré, à ce titre, quelques