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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

fut accomplie avant dix jours. Il y avait à Thèbes une vieille femme, parente de Pindare, et accoutumée à répéter la plupart de ses hymnes. Pindare lui apparut aussitôt après sa mort, et, pendant le sommeil, lui chanta un hymne nouveau à Proserpine. La vieille femme, une fois éveillée, écrivit tout ce qu’elle avait entendu en songe ; et il fut dit que, dans cet hymne posthume, le poëte, parmi différents surnoms donnés à Pluton, l’avait appelé le conducteur aux rênes d’or, par une allusion manifeste à l’enlèvement de Proserpine.

Pausanias, en rapportant la remarque, n’ajoute rien, et n’affirme pas que le génie du poëte se retrouvât dans cette réminiscence de sa vieille parente. On peut y voir seulement la preuve du caractère merveilleux dont l’imagination des Grecs aimait toujours à entourer le nom du grand poëte qui les avait charmés. Nulle fiction semblable n’allait suivre la gloire de Sophocle ou de tel autre génie de la Grèce, devenue philosophe autant que guerrière et poétique.

Quelques vers grecs, d’une date inconnue mais ancienne, consacrent par de touchants détails la fin du poëte dans les fêtes d’Argos[1] :

« Protomaque et Eumétis[2] aux douces voix pleu-

  1. Pind., vit. Bois. p. 6.
  2. Ἦ μάλα Πρωψομάχα τε καὶ Εὔμητις λιγύφωνοι
    Πινδάρου ἔκλαυσαν θυγατέρες πινυταί·
    Ἀργόθεν ἧμος ἵκοντο, κομιζοῦσ’ ἔνδοθι κρωσσοῦ
    Αείψσαν’ ἀπὸ ξείνης ἀθρόα πυρκαϊῆς.