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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

vrée la bataille d’Actium, que le génie romain gagnait, au profit d’un maître, contre l’amas confus et les pavillons barbares de l’Orient.

La flotte ottomane, forte de plus de deux cents galères poussées par les rames d’esclaves chrétiens, et traînant à sa suite une foule de navires, s’était embossée au rivage. La flotte chrétienne longea, du nord au sud, la côte d’Albanie, marchant à l’ennemi précédée de six galéasses vénitiennes, ou grands vaisseaux, dont les hauts bords et les feux étaient irrésistibles.

Là commandait don Juan, résolu de vaincre et négligeant les conseils timides et jaloux de quelques généraux de Philippe II. Sa grande force en navires et en soldats était italienne, ou plutôt italienne et grecque ; car c’est un fait aujourd’hui vérifié, qu’à part les douze galères du pape, les galères de Savoie, de Gènes, et de quelques villes ou même de quelques généreux citoyens d’Italie, les Vénitiens avaient seuls cent quatre galères, et, sur cette escadre, un grand nombre de Grecs, soit réfugiés de Morée, soit recrutés de Candie, de Corfou et des îles où flottait encore le pavillon de Saint-Marc. Selon les défiances de la politique vénitienne, aucun de ces sujets de la république n’avait de commandement maritime ni de grade militaire ; mais ils combattirent avec courage sous ce drapeau, que teignirent de leur sang quinze capitaines vénitiens et leur premier amiral.

Don Juan d’Autriche avait disposé lui-même l’ordre