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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

quel était ce nouveau-né, quel serait ce Dieu inconnu : un Dieu, un mort ou un roi ?

Allons, apportez les présents, les saintes prémices de la myrrhe, l’offrande de l’or, les pures vapeurs de l’encens ! Tu es Dieu ; reçois l’encens. Tu es roi ; je t’offre l’or : la myrrhe conviendra pour ta tombe. — Ta présence a purifié la terre, et les flots de la mer, et les routes où passa le démon, les plaines liquides de l’air et les profonds abîmes de la terre. Tu viens au secours des morts. Dieu descendu dans l’enfer ! sois propice, ô Roi ! et accueille la mélodie des pieux concerts. »

Voilà bien l’accent lyrique, sinon avec le torrent d’harmonie, le labyrinthe de souvenirs et d’images où nous entraîne Pindare, du moins avec la marche libre et mesurée de ces autres génies grecs imités par Horace, et dont il reste ça et là des tons brisés et des vers épars. Quelque chose de leurs accents altiers ou gracieux semble se retrouver ici, pour un ordre de croyances et d’émotions si peu soupçonné de ces poëtes et si nouveau pour le monde. Rien de plus heureux, ce semble, que le soudain passage de la sublime définition du Dieu, Fils et créateur, à l’adoration des Mages, et à ce mouvement du poëte, comme du coryphée de la scène antique : « Allons ! apportez les présents. »

Combien le sens expliqué de ces présents devait toucher l’âme chrétienne et la remplir d’un mystique