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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

métaphysicien poëte, inspiré par la contemplation solitaire et la liberté de quelque secte dissidente, dans l’ample sein du christianisme moderne.

Pour faire juger cette poésie, dont nous avons ailleurs, dans une intention plus générale, détaché quelques fragments, nous ne pouvons hésiter que sur le choix. Sans avoir la riche variété des mètres de Pindare ni l’audace de son langage, partout elle est élégante, neuve, singulière avec grâce, pleine du sentiment de la nature, et çà et là de quelques reflets égarés de l’imagination des sectaires orientaux. Tel est ce lever du jour chanté par le poëte :

« De nouveau la lumière, de nouveau l’aurore ; de nouveau brille le jour, après les ténèbres errantes de la nuit[1]. De nouveau chante, ô mon âme ! dans ton hymne matinal, le Dieu qui a donné la splendeur à l’aube, qui a donné à la nuit les étoiles, chœur circulant autour du monde. Sur le dos de la matière flottante s’est étendu l’éther, appuyé à la flamme montante du feu, dans la région où la lune radieuse coupe par la moitié le bas de l’univers.

Au delà cependant de la huitième sphère des orbes étoiles, un monde sans étoiles, entraînant sous lui des masses mues d’un mouvement contraire, tourne autour de la grande âme qui couvre sous ses

  1. Πάλι φέγγος, πάλιν ἀὼς,
    Πάλιν ἁμέρα προλάμπει,
    Μετὰ νυκτίφοιτον ὀρφάν.

    Συνεσίου ὕμνοι. Cur. Boiss., p. 102.