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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

portée par les enseignements célestes, après les eaux limpides que j’avais fait jaillir du rocher ! Quelle justice, grand Dieu, de m’accabler de maux et de craintes, parce qu’une ville a reçu de moi le sceau de la piété chrétienne ! Quelle justice qu’un autre charme sa pensée du spectacle de mes souffrances, en montant lui-même au trône pontifical, qu’il occupe sans droit, et où j’avais été promu par Dieu et les vrais serviteurs de Dieu ! Voilà le mal ! voilà ce que les fidèles de Dieu, dans la guerre lamentable qu’ils se font l’un à l’autre, ont machiné contre moi, parce que je ne voulais pas être l’athlète d’un parti, ni mettre quelque chose avant le Christ !

Ma faute, c’est de n’avoir pas fait la même faute que d’autres, et de n’avoir pas voulu attacher ma barque aux flancs d’un grand navire. Ainsi j’ai encouru la haine des hommes légers, qui ont livré sans scrupule la chaire pontificale aux amis de la fortune et du temps. Mais que l’abîme de l’oubli couvre tout cela !

Une fois éloigné, je goûterai la vie paisible, laissant là tout ensemble, et la cour, et les villes, et les prêtres, comme je le souhaitais jadis. Ainsi, avec joie, j’échappe à l’envie ; et, sorti d’une grande tempête, j’ai jeté le câble dans le port, où désormais, élevant mon cœur par d’innocentes pensées, j’offrirai à Dieu mon silence, comme autrefois ma parole. C’est Grégoire qui le dit, celui qu’avait nourri la terre de