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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

on peut la lire aujourd’hui, et reconnaître, sous la mesure trop uniforme de l’hexamètre, l’originalité affaiblie, mais présente d’un modèle inimitable. Si en effet ce rhythme pompeux, que l’ancienne poésie grecque a rarement fait servir à l’inspiration lyrique, est loin de pouvoir, aussi bien que l’impétueuse diversité du dithyrambe, suivre tous les mouvements de la muse hébraïque et s’élancer ou se briser comme elle, il nous semble cependant que cette paraphrase est encore toute frémissante d’une poésie qui doit tenir beaucoup du texte hébreu. La prose seule de saint Jérôme, cette prose latine d’un Dalmate naturalisé en Orient, cette prose savante encore, mais qui est comme forcée et emportée par la violence du souffle qu’elle voudrait contenir, nous étonne davantage et nous fait croire par moment que nous entendons la voix du Psalmiste interdite à notre ignorance.

Toutes ces magnifiques images, ces secousses de la pensée, ces élans de tendresse ou de douleur, ces dialogues de Dieu avec l’âme et de l’âme avec elle-même, toutes ces surprises, toutes ces épouvantes du drame lyrique de David, ne se retrouvent pas sans doute dans les hexamètres d’Apollinaire ; et cependant là même, ces belles hymnes, dont les premiers versets latins sont, pour ainsi dire, le titre vulgaire connu de ceux même qui ne le comprennent pas : Quare fremuerunt gentes ? — Cervus ut ad fontem ; — Super flumina Babylonis sedimus et flevimus, cum