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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

Celle liberté diminua fort sous Auguste, et on peut croire qu’il n’en resta rien sous Tibère. Dans ces jours de servitude, où des vers élégiaques non publiés et lus seulement par l’auteur à quelques cercles de femmes, étaient punis de mort, quel poëte aurait osé porter sur la scène les crimes ou les revers de la tyrannie ? quels acteurs auraient pu jouer les scènes des vieux drames interprétées par la terreur ou la haine présente ?

Ne soyons donc pas étonnés que, sauf les éloges donnés à la Médée d’Ovide et au Thyeste de Varius, il n’y ait aucun souvenir de la tragédie latine sous les premiers Césars. L’attention était lasse et la crédulité refroidie sur les demi-dieux et les héros de la Fable. On les aimait mieux en parodie, dans ces représentations burlesques des Trois Hercules faméliques, ou de Diane fouettée, dont parle plus tard Tertullien : et quant aux grands hommes de l’histoire, leurs images étaient bannies de la scène et ne pouvaient pas plus y paraître qu’elles n’osaient se produire même aux funérailles de leurs descendants.