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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

donnent l’idée que d’un drame d’autant plus bienséant sous l’empire qu’il était plus mythologique et plus loin de la réalité des passions humaines.

Quant à Pollion, que Virgile comparait à Sophocle, nous ne connaissons de ses drames que le conseil d’Horace lui disant : « Laisse quelque temps la Muse sévère de la tragédie manquer au théâtre[1]. » Et rien, dans les monuments trop rares de cette époque, ne nous apprend que cette interruption ait cessé. La justice envers le passé, la liberté de souvenirs que Pollion avait, à ce qu’il semble, portées dans l’histoire, auraient paru sans doute trop hardies sur la scène. Cet ami de César, d’abord allié d’Antoine, puis accueilli par Octave et, dans sa retraite littéraire, resté du moins impartial envers le parti qu’il avait combattu, ne pouvait mettre sur la scène ni ces grands caractères romains qu’il honora dans son histoire, ni les héros plus anciens qui les auraient rappelés.

Sous la courte dictature du premier César, il y avait à Rome un théâtre grec confié particulièrement à la protection du jeune Octave. D’autre part, l’histoire nous a conservé les amères allusions dont le poëte Labérius semait les vers de la pièce où César l’avait forcé de prendre lui-même un rôle ; et on sait quelle faveur avaient les Mimes, ou petites comédies latines.

  1. Paulùm severæ Musa tragœdiæ
    Desit theatris.

    Horat. Odar. l. II, i.